La quête vers la génération de questions : une entrevue avec le Dr Martin J. Richer
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Écrit par : Stefanie Valbon

Traduit par : Ève Mallet Gauthier

 

Bonjours chers lecteurs, bienvenue à notre première publication de style entrevue! Je me dois de débuter cette publication en soulignant à quel point je suis chanceuse d’avoir eu un extraordinaire mentor au cours des cinq dernières années. À mes yeux, il n’y avait aucun doute concernant qui allait être la première personne que j’allais interviewer pour mon blog. Ces publications-entrevue ont deux objectifs très spécifiques: 1) partager la recherche actuelle en immunologie en utilisant du vocabulaire accessible, et 2) partager des conseils aux jeunes scientifiques indécis. Cependant, après la lecture de cette publication, j’espère que vous serez d’accord avec moi pour dire que les conseils présentés ici peuvent s’appliquer à n’importe qui.

Sans plus de préambule, c’est avec grand plaisir que je vous présente le Dr Martin J. Richer. Merci Martin de prendre le temps de partager vos connaissances extraordinaires avec les lecteurs du blog ImmunoThoughts.

Martin et Moi à la conférence de la Société canadienne de l’immunologie, en 2019 – Banff, Ab.

 

Le parcours pour devenir scientifique

Je crois que la plupart des gens croient que pour devenir scientifique, il faut suivre un chemin très direct. Cependant, nous savons tous qu’il y a énormément d’éléments qui se cachent derrière ce que montre notre CV, et pour Martin, ce fut également le cas. Martin a grandi dans une petite ville appelée Lachute, située à une heure de Montréal, Québec. Sa famille, pour la plupart des éducateurs, ont encouragé la création d’un environnement où la curiosité et l’éducation étaient très valorisés.

 

Un livre mémorable que Martin a lu lorsqu’il était encore enfant. Ce livre parle de la vie de Louis Pasteur.

« En grandissant, je ne savais pas exactement ce que je voulais faire. J’ai plutôt bien réussi à l’école, et j’adorais les sciences. Par contre, du moins, en grandissant, je pensais vraiment que le chemin naturel lorsque l’on fait bien à l’école était de devenir avocat ou médecin. » Il m’a expliqué que son but original était de devenir médecin. Cependant, après ne pas avoir été admis à l’école de médecine, il a entamé un baccalauréat en microbiologie et immunologie à l’Université McGill. « Je voyais plus ceci comme une sorte de diplôme pré-med et je ne pensais pas vraiment que ceci allait devenir ma carrière et la quête d’une vie ». Même s’il concède qu’il ne savait pas grand-chose au sujet du programme, il affirme que celui-ci avait l’air très intéressant.

Martin raconte qu’il fut « très chanceux » au cours de sa carrière. Il explique qu’il a eu la chance de travailler dans un laboratoire lors de son premier été en tant qu’étudiant au baccalauréat. Puisqu’il n’avait aucune expérience antérieure en recherche, il affirme qu’il commit « erreur après erreur ». « Je suis certain que mon travail n’a absolument rien fait pour aider le labo, mais cette expérience m’a appris que j’aimais beaucoup la recherche scientifique, ainsi que la curiosité que cela implique ».

Martin a alors entamé son projet de recherche de spécialisation (« honours ») avec le Dr Michael DuBow. « J’adorais l’atmosphère du labo de recherche. Michael était très exigeant, mais il nous a réellement appris à se soucier plus des données que de l’impressionner ».

En expliquant son parcours, Martin touche à un sujet crucial, qui, je crois, a traversé plusieurs de nos esprits. « Il est très difficile de savoir ce que l’on veut faire. Même si j’ai grandi dans une famille très éduquée, personne n’était professeur d’université ». Il m’a dit que pour la majorité du temps que l’on passe en tant qu’étudiant au baccalauréat, nous voyons les professeurs et savons qu’ils sont des enseignants. Malheureusement, la plupart de nous n’ont pas la chance de voir l’aspect de la recherche et donc nous ne comprenons pas réellement ce que le poste implique.

Martin a ensuite fait une maîtrise, et il admet que « sincèrement, je n’étais pas certain que la recherche était le bon endroit pour moi à ce moment-là, et honnêtement, je n’ai pas travaillé assez fort et je ne comprenait pas que l’effort était ce qui était nécessaire pour avoir du succès en recherche ». Donc…

 

« J’ai quitté la science. Pour toujours. J’étais en train de m’en éloigner! »

Après ce moment (lequel je suis certaine que plusieurs d’entre nous avons aussi traversé), Martin décida de prendre une année de congé pour voyager. Il a beaucoup appris à propos de lui-même, et après une année à l’étranger, il savait qu’il avait besoin d’un emploi et la seule formation qu’il avait était en sciences. Martin dit avoir « été très chanceux » et a été accepté dans un poste de technicien dans le laboratoire de Dr George Spiegelman au département de Microbiologie et Immunologie à l’Université de la Colombie-Britannique, à Vancouver.

« George est la raison pour laquelle je suis encore un scientifique. George est l’une des personnes ayant eu le plus d’influence, parmi plusieurs, au cours de ma carrière ». Avec un grand sourire, Martin me raconte qu’une journée, Dr Spiegelman est venu lui parler et dit : « notre travail en tant que scientifiques académiques est de générer des questions et pas nécessairement de générer des réponses ». Cette conversation un peu sortie de nulle part a complètement changé la façon dont Martin voit la science. Il souligne le fait que la science est difficile parce que, la plupart du temps, on n’obtient pas les réponses que l’on cherche, mais si on cherche des questions, c’est une tout autre histoire. Ceci fut le moment décisif qui poussa Martin à poursuivre ses études en sciences.

Tout en poursuivant la description de son parcours de carrière – la complétion d’un doctorat à l’Université de la Colombie-Britannique et une formation post-doctorale à l’Université d’Iowa – il n’eut pas un seul moment où Martin oublia de reconnaître la contribution de ses anciens mentors : Dr Marc Horwitz, Dr John Harty et Dr Ninan Abraham sont quelques-uns des noms qu’il mentionna.

Il fut vraiment incroyable d’entendre comment chacun de ses mentors ont contribué à façonner sa carrière. « Je ne me serais pas rendu ici sans mes mentors, ceci est très, très clair. J’essaye de les remercier autant que possible et je ne serai jamais capable de le faire adéquatement. Donc, la seule chose que je peux faire est de donner au suivant ».

Martin est devenu un professeur assistant au Département de microbiologie et d’immunologie à l’Université McGill en 2014 et, depuis, a décidé de continuer à travailler sur d’incroyables projets de recherche. Note à part, je peux parler pour mes collègues de laboratoire en disant que, sans l’ombre d’un doute, Martin a réellement donné à son suivant!

 

Pourriez-vous nous expliquer votre recherche scientifique d’une façon très accessible?

« Le travail a énormément évolué, ce qui fait aussi partie du plaisir ». Martin me décris combien sa recherche a évolué depuis le début. « Pendant mes études de doctorat, j’ai commencé à travailler avec des virus qui causent des maladies autoimmunes, c’est-à-dire lorsque notre système immunitaire s’attaque à nous même, causant des maladies, au lieu de nous protéger. Ça me fascinait vraiment que certaines de ces infections, qui peuvent facilement être gérées par le système immunitaire, peuvent en fait envoyer des signaux au corps qui le font se retourner contre lui-même. » Mais comment est-ce que ça marche? C’est la question qu’il a commencé à se poser à cette époque. Pour être en mesure d’y répondre, il devait cependant d’abord comprendre les bases.

Il décida donc de se concentrer sur comprendre les mécanismes de fonctionnement des cellules T CD8. « Je suis devenu fasciné par ces cellules, appelées cellules T cytotoxiques – ou cellules T tueuses – et leur travail à tuer les cellules infectées. » Même si dans un bon nombre de cas, ces cellules fonctionnent parfaitement bien, si elles reconnaissent la mauvaise cellule, ou si elles reçoivent un signal erroné, elles peuvent se retourner contre les cellules de notre corps et causer des maladies. Il poursuivit son explication de ce processus dans le diabète de type I, causé lorsque les cellules T tuent nos cellules productrices d’insuline dans le pancréas.

 

« Comment ces cellules fonctionnent-elles? Quels sont les signaux qui disent à ces cellules qu’il est correct ou non de répondre? »

Si vous vous souvenez de ma dernière publication, j’ai mentionné que les cellules T CD8 ont besoin d’être activées afin de pouvoir commencer à travailler. Martin s’est intéressé à la capacité des cellules T CD8 à être activées avec seulement une très petite quantité de ce qu’elles ont besoin de reconnaître. « Les cellules T CD8 sont spécifiques à ce morceau spécifique pour ce virus particulier, et elles ont besoin d’être capables de trouver une toute petite quantité de ceci » pour être en mesure d’effectuer leurs fonctions à temps pour protéger une personne infectée. Martin explique ensuite qu’il a commencé à explorer les signaux qui font en sorte que les cellules T CD8 répondent très bien, et d’autres qui affectent négativement leur réponse.

“Pourquoi avons-nous le virus de l’hépatite C qui reste dans le corps, potentiellement pour toujours? Pourquoi avons-nous le cancer, lorsque les cellules T CD8 devraient tuer les cellules cancéreuses, mais ne le font pas? Pourquoi avons-nous le diabète, où les cellules T ne devraient pas tuer nos propres cellules, mais le font quand même? » Il s’agit ici de la vision globale de son labo : comprendre comment les cellules T sont régulées par divers signaux externes. Les signaux leur disent quoi faire, quand le faire et comment bien le faire.

Image créée avec Biorender

 

« Je suis vraiment un chercheur scientifique de base dans l’âme. Pour moi, c’est un peu comme être mécanicien. Peut-être que vous serez chanceux et vous arriverez à réparer une voiture sans savoir du tout comment elle fonctionne. Cependant, c’est plus facile si vous savez comment ça marche et quelques-uns des mécanismes qui peuvent causer des problèmes. »

Martin concède que notre capacité à prendre une situation très complexe et tenter de comprendre comment elle fonctionne est incroyable. « Ceci est la beauté des sciences académiques. Personne ne me dit que j’ai besoin de faire un médicament pour X ou Y, mon travail est de générer des questions! Ceci nous ramène à ce que Georges m’a dit. Tout ce que l’on fait, si ça génère plus de questions, on fait notre travail. C’est pourquoi c’est si fascinant. Nous n’allons jamais tout comprendre, il y aura toujours quelque chose de nouveau, quelque chose que l’on ne connait pas, et c’est pour cela que ceci est tellement amusant. »

 

Je crois que nous sommes tous d’accord que votre travail semble merveilleux. Dites-moi, qui exactement peut devenir un scientifique?

« Tout d’abord, tout le monde peut être un scientifique. » Martin croit que l’on n’a pas besoin de naître dans une famille spécifique pour devenir scientifique, « tant que l’on est curieux et qu’on a un désir d’apprendre », il est possible de réussir.

Il affirme que, d’une certaine façon, nous somme tous des scientifiques à un moment ou un autre de notre vie. Lorsque nous sommes enfants, les petites observations que l’on fait, telles que regarder les feuilles et les insectes, sont de la science. Cependant, souvent, le problème survient lors de la transition entre les études au premier cycle et les études aux cycles supérieurs. Il dit que notre système d’éducation se concentre sur l’enseignement de choses que l’on sait, mais dès que l’on passe aux cycles supérieurs, tout est différent. À ce stade, on commence à se concentrer sur les choses que l’on ne sait pas, et ceci peut être difficile pour plusieurs étudiants. « Il faut être assez humble pour reconnaître ce que l’on ne sait pas. »

 

« L’autre conseil important pour un jeune scientifique est simplement de faire ce que tu aimes. »

Martin touche alors à un sujet qui peut troubler plusieurs étudiants. Nous entendons constamment les professeurs s’inquiéter de financement, et de comment la recherche peut être compétitive. Martin a un peu éclairci la question pour moi en disant : « Suis ta passion, travaille sur ce que tu aimes. S’il s’avère que ce qui t’intéresse est le type de cellule le plus hot du moment, c’est cool, mais si non, peu importe, continue à avancer et suis les données! Tant que tu fais de la bonne science, celle-ci sera reconnue. »

 

“Sois prêt(e) à t’intéresser à quelque chose, sois prêt(e) à te battre pour cette chose, mais sois aussi prêt(e) à avoir tort. »

Tout comme pour n’importe quel autre emploi, être un scientifique peut être très difficile, et ceci ne devrait pas être caché. Les journées peuvent être assez longues, les expériences peuvent ne pas fonctionner, mais l’important est de savoir prendre du recul et apprendre de ses erreurs.

« Lorsque tu fais une expérience et que celle-ci ne donne pas les résultats attendus, ta première réaction est probablement de la mettre de côté. Par contre, une bonne partie de mon programme de recherche découle d’expériences qui ont, d’une façon ou d’une autre, tué une autre idée. » Martin a appris de ses mentors à regarder des données et voir ce qu’elles te montrent. « Oui, celles-ci peuvent te dire que tu as tort, d’une certaine façon. Mais la plupart du temps, les données te disent quelque chose de plus! La volonté de reconnaitre que ‘Hé, ceci est différent!’ est une partie importante pour pousser de l’avant les projets de recherche. » Il continue à affirmer que tu n’as pas tort, tu es simplement en train de mettre au jour plus de questions à répondre. « C’est ce qui rend ce travail unique! »

Évidemment, tout n’est pas toujours facile lorsque l’on décide de poursuivre une carrière de scientifique. « Oui, je me plains au sujet de beaucoup de choses en lien avec ce travail. C’est un travail difficile qui demande beaucoup de notre temps. C’est un domaine stressant et compétitif. Mais au bout du compte, j’ai la chance de poser des questions pour gagner ma vie. Vraiment, je peux poser n’importe quelle question que je veux, tant que je pose et adresse les questions comme il le faut, personne ne va questionner ce que je fais. » Peut être plus important encore, Martin mentionne aussi qu’il a la chance de travailler avec d’incroyables jeunes scientifiques que les voir grandir en tant que scientifiques et en tant que personnes puis poursuivre leur carrière est l’aspect le plus gratifiant de ce travail. « J’ai été incroyablement chanceux de travailler avec des étudiants exceptionnels qui m’en ont appris autant que je leur en ai appris. Ils sont la raison pour laquelle j’aime autant ce que je fais. »

Donc, « Si vous aimez poser des questions, si vous êtes curieux et si vous aimez aller au bout des choses, il s’agit de la carrière parfaite pour vous. Faite toujours de la bonne science et suivez les données! »

 

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